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Matthieu Blazy, à fleurs de peau

De la fenêtre de son bureau milanais habillé de bois, on aperçoit la chaîne des Alpes en arrière-plan et les grues chargées de hisser les infrastructures des prochains Jeux olympiques d’hiver. Loin du grand capharnaüm du monde et de la mode, Matthieu Blazy, directeur de la création de Bottega Veneta, rassemble ses idées dans ce lieu qui tient davantage de l’appartement que de l’espace de travail. Avec la nonchalance heureuse qui le caractérise, il prend un plaisir évident à raconter le nouveau terrain de jeu qu’il s’est choisi : le parfum.
C’est à son initiative que la maison italienne présente une collection de cinq fragrances. Le créateur parle avec justesse et intelligence de ce nouveau métier, n’essayant jamais d’adopter un discours d’expert ou de briller en brandissant des noms savants de matières premières. Des nez de la société allemande Symrise l’ont accompagné dans l’aventure : Alexandra Carlin, Aliénor Massenet et Pierre Guéros.
Le styliste franco-belge, passé par l’Ecole nationale supérieure des arts visuels de La Cambre, à Bruxelles, raconte comment les idées sont nées. Au discours ingrédientaire et aux planches d’inspiration dont la mode a le secret, Matthieu Blazy a ­préféré l’évocation de sensations physiques. « Je leur ai beaucoup parlé de peau, celle qui est caressée par le soleil ou par l’étreinte amoureuse », précise-t-il en souriant. Une peau qu’il voit comme l’ultime ingrédient de la formule.
Qu’ils s’affichent en italien, en français ou en anglais, les noms choisis ne visent ni la fonctionnalité, ni la forme figurative : Déjà minuit, Colpo di Sole (« coup de soleil »), Alchemie, Acqua Sale et Come with me. En dépit de sa méconnaissance de l’art olfactif, le directeur artistique de la maison italienne avait quelques convictions fortes : « Je ne voulais pas de senteurs trop fleuries et j’avais envie que les nez travaillent exclusivement avec des matières d’origine naturelle. » Une contrainte technique importante quand on sait que les molécules de synthèse permettent à la fragrance de diffuser son sillage dans l’air et de tenir longtemps sur la peau.
Le tout juste quadragénaire au regard enjoué tend des languettes de papier sur lesquelles ont été pulvérisées les senteurs. Première observation : les compositions, d’une grande fluidité, ne succombent à aucun des tics du moment comme la puissance des bois ambrés, des ingrédients qui injectent de la testostérone dans les fragrances à la mode. Lui qui se demandait, à l’occasion de son défilé printemps-été 2025, si l’on pouvait « trouver le pouvoir dans la douceur », apporte déjà une réponse olfactive.
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